LED it be

Les ampoules LED attirent deux fois moins les insectes que les ampoules à filament

D’après les prévisions, plus de 70 % de l’éclairage public et résidentiel sera assuré par des ampoules LED d’ici 2020. Voilà qui va épargner des vies… chez les insectes !
Une récente étude a montré que ces ampoules à basse consommation attirent deux fois moins les papillons et autres bestioles volantes que les ampoules classiques à filament.

Vous connaissez le truc. Vous faites trainer l’apéro en terrasse, vous allumez la lumière, et paf, une nuée d’insectes débarque. Tout ce petit monde se fait lamentablement griller ou meure d’épuisement à tourner en rond.

Mais, bon sang, pourquoi tant d’insectes sont-ils attirés par la lumière ? (Nous nous sommes tous posé la question un jour et je compatis pour les parents qui doivent y répondre…)
D’après l’OPIE, « la meilleure explication est que les insectes utilisent les astres pour se diriger. » Malheureux ! Ils confondent nos lumières avec la lune !

Astrolabe

Qu’on se le dise, les animaux ont le compas dans l’oeil et leur survie dépend de leur efficacité à se déplacer, localiser les ressources, migrer ou rentrer chez eux en toute sécurité. Pour ce faire, l’évolution les a doté de systèmes de navigation hyper-performants (ceux qui se sont perdus en route ne sont plus là pour témoigner). En l’occurrence, beaucoup d’insectes pratiquent « l’astronavigation ».

On imagine bien un moucheron, les yeux au ciel, prendre son sextant et se lancer dans des calculs alambiqués que seul un marin féru d’histoire et de géométrie serait capable de réaliser aujourd’hui.

Pardon. Restons sérieux et remercions le scientifique Rüdiger Wehner qui depuis 40 ans fait progresser les connaissances sur le monde fabuleux des arthropodes navigateurs. « Les insectes ne sont pas des astronomes. Ils ne sont même pas en capacité de voir les étoiles », souligne-t-il dans l’une de ses publications. Par contre, ils peuvent appréhender un phénomène qui échappe à l’œil humain : la polarisation de la lumière céleste. Ils se guident selon son axe. D’après les travaux de Wehner, dans les yeux multi-facettes des insectes seules les cellules qui réagissent aux rayonnements ultraviolets sont impliquées dans la perception de la lumière polarisée. Adepte du principe de parcimonie, le chercheur émet l’hypothèse que la sélection naturelle aurait favorisé cette « instrumentation » par les UV tout simplement car ils sont les plus stables et les moins sensibles aux perturbations atmosphériques. Les insectes peuvent capter les ondes polarisées de l’ultraviolet par tous les temps, épaisse couverture nuageuse ou pas. Et même en lune croissante ! D’autres travaux menés sur le bousier ont montré qu’une polarisation céleste très faible suffit pour guider le coléoptère. En outre, il roule sa bosse en ligne droite de façon aussi précise que sous un ciel de pleine lune.

Cabine à UV

Génial, précis et ultra sensible, le système de navigation des insectes a au moins une faille. Il les fait tomber dans un piège écologique. Autant la lune reste inatteignable et sa lumière polarisée indique une direction fixe, autant les insectes fonceront sur une bonne vieille ampoule dont la lumière se polarise aléatoirement et les fera tourner en rond.

En utilisant des LED, sans le savoir, nous sauvons les insectes du ridicule… et d’une fin tragique. Car la technologie LED consiste à convertir l’électricité en radiation électromagnétique dans le seul spectre du visible et réduire les déperditions dans les infra-rouges et les ultraviolets.
Pas d’UV, pas de navigation !

 


Source :

Experimentally comparing the attractiveness of domestic lights to insects: Do LEDs attract fewer insects than conventional light types? Ecology and Evolution, oct. 2016DOI: 10.1002/ece3.2527

How dim is dim? Precision of the celestial compass in moonlight and sunlight. Philos Trans R Soc Lond B Biol Sci., 366(1565): 697–702, mars 2011

A lire ou à re-lire :

Wehner R. Navigation in context: Grand theories and basic mechanisms Journal of Avian Biology. 29: 370-386, 1998
Wehner R. Polarized-light navigation by insects. Scientific American. 235: 106-15. PMID 935846, 1976

Micrologie tient à remercier Alain Fraval de la revue Insectes qui a « épinglé » cette histoire de LED pour les passionnés d’entomologie (c’est par ici)


Illustration :

Un papillon dans la lune, bricolage Micrologie, 2017, inspiré par Le Voyage dans la Lune de Georges Méliès, 1902.

 


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4 Comments

  1. JMi
    14 avril 2017
    Reply

    Bah alors, et les chauves-souris alors ? Elles avaient droit à des centaines de proies faciles sous chaque petit lampadaire, finie la vie de patachon ? Je vais monter une pétition contre les lampes à LED… 😉

    • Planouille
      15 avril 2017
      Reply

      Où à une concentration d’espèces-proies sous les lampadaires, soit une redistribution de celles-ci, au détriment des chauves-souris lucifuges…

  2. Planouille
    15 avril 2017
    Reply

    C’est pas le bon où…

  3. […] les animaux. Ils sont assez proches de nous, ce n’est pas trop difficile. Quand il s’agit d’insectes, ça demande une bonne gymnastique. Mais dès qu’on parle de plantes, s’ouvre un gigantesque […]

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