Doggy bag, truc de plouc?

La honte ! Pour chaque repas au restaurant, plus de 200 grammes de nourriture finissent aux ordures, ça commence à bien faire. Si vous avez un peu voyagé, vous savez qu’emporter ses restes ne pose aucun souci. Mais l’avez-vous déjà fait dans un restaurant français ? Une étude récente vient de montrer que le « doggy bag » soulève quelques émotions contradictoires par chez nous. Alors que les trois quarts des personnes interrogées trouvent que c’est une excellente idée, seulement une sur dix est déjà partie avec son reste de dîner sous le bras. C’est culturel qu’ils disent ! D’après les témoignages, la french touch a la vie dure : « je n’ose pas, les autres me regardent », « trop bon pour finir dans un sac », « ça fait radin », « un truc d’américains ». Et tout le monde se sent mal à l’aise. Le doggy bag ne se pratique pas, pour autant, tous les sondages montrent que, dans leur écrasante majorité, nos concitoyens ont une conscience aiguë des problèmes que pose le gaspillage alimentaire.

De l’importance du nombril

Où est-ce que ça bloque ?!
Du monde se remue les méninges pour faire changer les mentalités. Afin de lutter contre un snobisme mal placé, des idées naissent : le branché, dans une jolie petite boîte de chez Take-away ou encore la démarche Gourmet bag portée par les services publics.
Mais les leviers sont peut-être ailleurs. D’après une étude menée par des sociologues de l’INRA, notre attitude vis-à-vis du gaspillage résulte de préoccupations qui se jouent à deux échelles : notre petite personne et la planète. L’acte de jeter de la nourriture a, à la fois, un effet sur l’environnement (déchets, impacts de l’agriculture, misère du monde…) mais aussi, un effet au niveau individuel, comme un bon petit plat perdu, un trou dans le portefeuille, générant culpabilité ou colère. Et ces deux niveaux n’ont pas la même influence sur le comportement. Statistiquement, les tracas égoïstes ont une influence significative sur l’acte de jeter (ou non) des restes, l’inquiétude pour des enjeux planétaires beaucoup moins. Ça me rappelle ce que ma maman nous disait quand nous ne finissions pas notre assiette : « pensez aux autres enfants en Afrique qui n’ont rien à manger ». Ce à quoi nous répondions de conserve, non sans insolence : « ben, t’as qu’à leur envoyer ! ». Quand elle a retiré de notre argent de poche les frais d’envoi pour l’Ethiopie, on n’a plus jamais fait les malins. Vous suivez la métaphore ? Comme le montre l’étude des sociologues, dès que ça nous concerne directement, notre comportement change. D’après les chercheurs : « il semble plus judicieux de sensibiliser le consommateur via des préoccupations personnelles que via des préoccupations plus globales comme les conséquences sur la planète ou la gestion des déchets.»

Hypocrites

C’est carrément flippant ! Mais, pour preuve, les personnes de plus de 65 ans jettent beaucoup moins, alors qu’ils sont pour la plupart moins sensibles aux problèmes environnementaux et moins mondialisés. Interrogés, ils reconnaissent s’inquiéter pour leur argent et ne se permettraient pas de gâcher, par culpabilité pour de sombres épisodes de l’Histoire. La nouvelle génération, quant à elle hyper informée et ecolo-alertée, remplit les poubelles.

 

 


[E.Le]

Source: Consumer’s Concern For Food Waste: Conceptualization and proposition for a measuring scale & Understanding the antecedents of consumers’ attitudes towards doggy bags in restaurants: Concern about food waste, culture, norms and emotions, Journal of Retailing and Consumer Services, 2017

Illustration: Doggy bag, collage Micrologie, 2016 (le froufrou vient de El caballero de la mano en el pecho, El Greco, 1580). 

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